Nouvelle-Aquitaine
Charente-Maritime
Les données qui caractérisent le PAT La Rochelle-Aunis-Ré illustrent bien le fonctionnement du système alimentaire au niveau mondial : un territoire
[1] dont l’OTEX dominante est la production de céréales et d’oléo protéagineux, majoritairement destinés à l’exportation avec le port de commerce de La Rochelle, outil structurant des productions locales et au-delà. Ainsi, en 2017, le territoire est qualifié d’une autonomie alimentaire de 2% par une étude du cabinet de notation extra financière Utopie. 98% de ce qui est consommé par les habitants du territoire est importé et seuls 2% de la production du territoire sont consommés par les. Les modes de culture qui accompagnent ce modèle sont orientés sur les techniques de l’agriculture conventionnelle, utilisatrice d’intrants chimiques pour les engrais et les pesticides. Si on regarde les quelques travaux de prospective sur l’économie agricole locale, présentés lors du diagnostic de l’offre agricole du PAT en 2021, les circuits-courts sont pour les différentes typologies d’exploitation une garantie (la seule ?) d’augmenter leur valeur ajoutée dans le contexte d’agrandissement et de baisse de la main d’œuvre agricole annoncée, et d’enjeu renforcé de rentabilité économique pour les exploitations. Ce constat est valable tant pour les systèmes, tant grandes cultures, que pour les systèmes de polyculture élevage ou le maraîchage. Cette question de la prospective agricole apparait cruciale pour l’avenir de l’agriculture locale, confrontée à la concurrence internationale et aux marchés mondiaux pour le prix des productions.
En parallèle, les impacts des modes de production agricoles sur l’environnement ou la santé sont bien là. Historiquement c’est le programme Re Sources qui le premier en 2010 va prendre en charge la question de la qualité de l’eau, dégradée en azote et en pesticides au niveau des captages de La Rochelle, situés sur l’agglomération et en Aunis. En 2024, se clôture le troisième programme d’actions de Re Sources. Les résultats obtenus sur l’aire d’alimentation des captages sont ténus, malgré une animation dynamique et une gouvernance qui associe l’ensemble des acteurs. Ainsi les captages ont dû être fermés une partie de cette année 2024 du fait de la présence de chlorotalonil à un seuil préoccupant. Re Source intervient sur :
Ø Le financement d’actions pour la protection de l’eau : des formations, des journées techniques, des expérimentations aux champs, des accompagnements collectifs et individuels des agriculteurs, des études.
Ø Le financement de suivis : de la qualité des eaux superficielles, de la biodiversité inféodée aux milieux aquatiques, de la bonne couverture des sols en période à risque, des infrastructures agro-écologiques du territoire.
Ø L’acquisition foncière à l’amiable sur les périmètres de protection des captages et instauration de baux ruraux environnementaux sur le foncier acquis
Ø Les aides financières : Elaboration de PAEC avec 15 Mesures Agro-Environnementales et Climatiques (MAEc), Paiements pour Services Environnementaux (PSE)
Ø La réduction des pressions sur les milieux : implantation de linéaires de haies, maintien des surface en herbe, développement des alternatives à l’utilisation des produits phytosanitaires, développement de l’agriculture biologique.
Ponctuellement le service de l’eau de l’agglomération de La Rochelle a aussi mis en place :
- Un classement en cours d’eau Bonnes Conditions Agricoles et Environnementale de l’écoulement de Casse Mortier à Varaize, augmentant la surface de bandes enherbées pérennes aux abords du fossé.
- Un classement des Aires d’Alimentation du Captage de Varaize, du Périmètre de Protection de l’Eau de Casse-Mortier et le Périmètre de Protection de l’Eau de la Ragotterie en Zone d’Action Renforcée
En dehors des actions du programme Re Sources, des initiatives communales ont vu le jour pour répondre aux inquiétudes des riverains en cherchant à créer des zones tampons :
· Bourgneuf: mise en place d'un emplacement réservé de 20m de large pour création d'une ceinture verte plantée.
· Clavette: demande de mise en place de zones enherbées le long des fossés
· Saint-Rogatien: définition d'une bande non-traitée, type jachère
Les résultats sont similaires sur le captage de Landrais, suivi dans le cadre d’un autre programme Re Source par le syndicat départemental des eaux Eaux 17 sur le territoire d’Aunis Sud.
En parallèle, les études ATMO mettent en valeur la présence de pesticides dans l’air, conduisant à un suivi régulier qui met en avant des taux record de pollution par rapport au niveau national, majoritairement dû au recours des herbicides à l’automne pour désherber les blés d’hiver. Ces observations conduiront à une mission spécifique pour renouer le dialogue entre les agriculteurs et les habitants, inquiets et parfois directement touchés par cette situation (sur représentation des cancers pédiatriques observée par l’ARS et l’hôpital de La Rochelle). Les élus de l’Agglomération de La Rochelle porteront également des demandes de moratoire auprès du Ministère de l’agriculture concernant cette molécule, et prendront part à des motions pour favoriser la relocalisation et les changements de pratique à travers l’association France Urbaine. A l’échelle du PAT, un groupe de travail est dédié au développement des pratiques vertueusesen matière de préservation de la santé et de l’environnement.
Au niveau du Contrat Local de Santé, et en lien avec le PAT, des actions ont pu être définies qui répondent à ces questions de santé environnementale :
Ø Intégration d’un volet Santé Environnement incluant notamment la problématique des pesticides au regard de la santé
Ø Fiche action Prévention Cancer
Ø Projet Ordonnance Verte
Ø Projet 123 Santé : « Nos produits à la loupe»
Enfin, les données sur la biodiversité enregistrent sur le territoire du PAT le même recul alarmant de la diversité et de la quantité des espèces.
Les productions en place apparaissent peu résilientes face au changement climatique. La faible diversité des production, les rotations courtes, la dépendance à l’eau d’irrigation, sont autant de facteurs qui soulignent le fait que le modèle dominant, assez éloigné de l’agro écologie sera moins robuste pour résister à des crises climatiques (épisodes de sécheresse, année pluvieuse…). Depuis 3 ou 4 ans, les agriculteurs témoignent de ces difficultés de pilotage des exploitations (décision relative à l’assolement, incertitude sur l’accès à l’eau d’irrigation) pour sécuriser la production et les revenus. La prise en compte des changements climatiques et la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre ne sont pas encore incitatives pour sortir de la dépendance aux énergies fossiles par exemple en réduisant l’azote minéral qui a des impacts sur la qualité des eaux. De même le développement des pratiques favorables au stockage du carbone dans les sols agricoles fait l’objet de travaux en local et d’expérimentations, mais le nombre d’agriculteurs impliqués reste faible.
Le PAT La Rochelle-Aunis-Ré fait le pari de la transition agro écologique par la relocalisation d’une partie de l’alimentation de la population.
Sur le plan du foncier agricole, dans le cadre du PAT, les EPCI développent des actions pour maîtriser du foncier et orienter les itinéraires vers l’agro écologie. Ils travaillent également sur la création d’espaces tests, offrant des conditions favorables au changement de pratique. Les baux ruraux environnementaux sont privilégiés dans la mise à disposition du foncier. De même le PAT finance les diagnostics à la conversion pour les exploitants qui en font la demande, ainsi que des études technico économiques. Les porteurs de projet bénéficient de formations et d’accompagnement technique et économique lors de leur installation. Des moyens sont également mobilisés pour permettre un équipement minimal des terrains.
Un règlement d’intervention économique est à l’étude pour aider directement les exploitations agricoles qui iraient vers une transition agro écologique.
Parce que la vente directe et les circuits de proximité sont une meilleure source de revenu pour les producteurs, parce que continuer dans le modèle conventionnel apparaît risqué pour la santé des populations, de l’environnement et des agriculteurs, y compris leur santé économique, associer relocalisation et itinéraire vertueux de production refonde les bases d’un contrat entre les agriculteurs et la société. Le PAT, par ses outils de déploiement des filières (groupement de commande innovant) ou de leur diversification, par ses capacités à soutenir des investissements structurants (légumerie) propose aux producteurs de s’inscrire dans un cadre sécurisé pour leur transition tout en répondant aux attentes sociétales locales. En renouant des relations producteurs / habitants le PAT dessine les contours d’une démocratie alimentaire. Il s’appuie pour cela sur un vaste plan de sensibilisation aux nombreux outils et publics et souhaite déployer un plan de communication pour développer chez les consommateurs des réflexes de consommation vers les produits locaux durables.
[1] hors Ile de Ré, marquée par des productions agricoles spécifiques comme la vigne et la pomme de terre AOC