Normandie
Calvados
Le territoire du PAT Caen Normandie Métropole correspond à près d’un tiers du territoire départemental (1605 km2 sur 5535km2). L’activité agricole y est très visible : dans la plaine de Caen, les paysages ouverts ont été façonnés par une agriculture fortement mécanisée et à la recherche des meilleurs rendements, qui prend son essor après la Seconde Guerre mondiale. Les cultures de céréales et notamment de blé tendre y sont majoritaires, viennent ensuite les cultures d’oléo-protéagineux puis les cultures industrielles (principalement le lin textile, la culture du chanvre étant en phase d’émergence). Les exploitations spécialisées en grandes cultures représentent environ 60% des exploitations agricoles du territoire, leur superficie pouvant dépasser les 200 hectares. Les céréales cultivées sont très majoritairement dédiées à l’export (pays du Maghreb notamment), via les ports de Caen-Ouistreham (quai de Blainville) et de Rouen.
Au sud-ouest du territoire, on retrouve du relief et des boisements (forêt de Grimbosq notamment) : c’est la Suisse Normande. Du fait du relief, les exploitations sont plutôt en polyculture-élevage (bovin-lait, bovin-mixte et dans une moindre mesure bovin-viande) et davantage tournées vers la vente directe ou en circuit court. Cette agriculture s’appuie sur des prairies temporaires ou permanentes et des haies bocagères, utiles pour la qualité de l’eau, le stockage du carbone et la biodiversité. La diversité des paysages y est préservée, ce qui constitue une aménité appréciée des touristes venant en Suisse Normande pour des loisirs extérieurs. Cependant, le paysage dominant du territoire de Caen Normandie Métropole est bien la plaine céréalière, à l’inverse de l’image d’Epinal de la Normandie avec ses vaches paissant sous des pommiers haute tige. Les produits emblématiques que sont le jus de pomme, le cidre et le calvados sont bien valorisés par quelques cidriculteurs (qui proposent souvent visites, dégustation voire gîte à la ferme) mais la production de pommes et poires de table est insuffisante par rapport aux besoins de la population.
Concernant la production de légumes, les bassins légumiers historiques (marais arrière-littoraux et marais au sud de Caen) sont en partie déconnectés de l’agglomération de Caen, contrairement à ce que l’on observe à Lorient, Nantes ou Grenoble. Il n’y a pas de ceinture maraîchère autour de Caen mais des exploitations disséminées parfois loin du centre de consommation. Les cultures légumières de plein champ sont peu diversifiées (oignons, salades et endives, carottes arrivent en tête en volumes) et souvent destinées à quitter le territoire. On note donc une faible représentation du modèle de la petite exploitation bio en circuits-courts ou en vente directe (presque 3 fois moins importante qu’à Angers - ville de la même taille de Caen - et 4 fois moins qu’à Rennes). Il y a toutefois une dynamique des AMAP comparable à ce que l’on observe ailleurs, bien qu’en ralentissement ces dernières années. Il faut aussi souligner une autoproduction (production destinée à la consommation du ménage) non négligeable, notamment dans les quartiers anciennement ouvriers de l’agglomération caennaise, comme à Cormelles-le-Royal et ses jardins familiaux.
A l’instar d’autres territoires de grandes cultures, l’agriculture pratiquée dans la plaine de Caen pose des défis en matière de santé-environnement. Elle engendre des pollutions dans l’air, les sols et l’eau ainsi qu’une perte de biodiversité, en raison de la prépondérance des grandes cultures à haut niveau d’intrants (engrais minéraux et surtout pesticides). Le nombre d’exploitations en agriculture biologique a augmenté dans la décennie 2010 (+ 73) mais leur part reste inférieure à la moyenne nationale (8% contre 12% en 2020). Le modèle agricole principal interroge aussi quant à sa durabilité et sa résilience face au changement climatique. Les pratiques agricoles intensives, couplées à l’arasement des talus et à l’arrachage des haies, entrainent une perte de matière organique et donc une baisse de la fertilité naturelle des sols, encore mal mesurée. Cette dégradation des sols altère aussi leur capacité à absorber l’eau de pluie, alors même que la récurrence des épisodes de pluie intense ou de sécheresse augmente. C’est pourquoi le PAT souhaite mieux faire connaître ces problématiques aux acteurs du territoire, afin d’encourager les politiques d'accompagnement à l'agroécologie et de préservation de la qualité de l’eau, via la plantation de haies, le maintien des prairies et zones humides…
Ce modèle agricole de la plaine de Caen apparaît également en décalage par rapport à l’objectif premier d'un PAT : rapprocher production et consommation au sein d’un même territoire. Il s’agit en effet d’exploitations bien insérées dans l’économie mondialisée, bénéficiant de cours favorables (pour le blé comme pour le lin textile). Les objectifs de diversification agricole et de création de filières de proximité trouvent donc difficilement écho auprès des organisations professionnelles représentant les agriculteurs du territoire. Le PAT tente alors d’agir au niveau du foncier, en valorisant les outils que peuvent s’approprier les collectivités pour favoriser des installations d’agriculteurs souhaitant orienter leurs débouchés en circuits courts alimentaires de proximité.
Du côté du consommateur, la possibilité d’acheter « local » lorsqu’on habite Caen est réduite si l’on considère uniquement les productions issues du territoire du PAT, mais les perspectives s’ouvrent en intégrant l’ouest du Calvados avec le bocage virois et l’est avec le Pays d’Auge. Les complémentarités entre ces zones de productions diversifiées et le bassin de consommation de l’agglomération caennaise sont donc à développer, faisant de la restauration collective et de la logistique des CCAP des enjeux forts du PAT. La ville de Caen et les communes littorales ayant un attrait touristique certain, une meilleure promotion des produits issus du territoire est à soutenir (restaurants, commerces de bouche...). Enfin, l’inflation des dernières années ayant entrainé davantage de personnes en situation de précarité alimentaire, il importe de mieux identifier les différents contextes de précarité et de travailler à une meilleure coordination des acteurs de l’aide alimentaire avec les producteurs ou grossistes.